Séminaire : « Perspectives comparatives sur les droits des peuples autochtones »
L’équipe ERC SOGIP, dirigée par Irène Bellier, a le plaisir de vous inviter au séminaire mensuel : « Perspectives comparatives sur les droits des peuples autochtones » – année 2014-2015 : participation politique et citoyenneté
Date : Jeudi 11 décembre 2014
Heures : 9h-13h
Lieu : EHESS, Salle du Conseil A, bâtiment Le France, 190 av de France, 75013 Paris.
2ème séance : Reconfigurations de l’État face aux revendications autochtones : multiculturalisme et biculturalisme en perspective
Intervenants :
Natacha Gagné (Professeure, Université Laval),
Professor Vuokko Hirvonen (Sámi allaskuvla/Sámi University College)
Akuavi Adonon Viveros (Professeur chercheur à l’Université Autonome Métropolitaine, campus Cuajimalpa)
Présentation :
La reconnaissance au niveau international, dans les années 80, des droits des peuples autochtones, a ouvert des enjeux très importants qui mettent en tension les relations politiques, juridiques, économiques que ces nouveaux sujets de droit entretiennent avec l’État. La construction au niveau international de nouveaux imaginaires politiques autochtones conduit aussi à repenser l’État, dans la mesure où celui-ci représentait l’institution déterminant la conceptualisation et le sens d’une autochtonie subalterne.
Plusieurs États concernés par les revendications autochtones sont ainsi passés du cadre de référence de l’État-nation à celui de l’État multiculturel. Quelques-uns, menés plus loin par des discussions autour de la décolonisation et par des transformations constitutionnelles ont adopté un cadre plurinational. Si ces changements ont permis la reconnaissance de certains droits aux peuples autochtones, ils ont aussi ouvert plusieurs défis, liés à l’appropriation des nouveaux dispositifs et espaces politiques, aux contraintes liés à la reconnaissance formelle de la « culture », de la langue ou des systèmes normatifs autochtones, ainsi qu’à la production de nouveaux rapports de pouvoir. Nous explorerons ces dynamiques à travers trois interventions, portant sur la reconnaissance des systèmes normatifs au Chiapas, la mise en place de systèmes d’éducation Saami dans les pays nordiques (notamment la Norvège), et sur les espaces de participation politique ouverts en Nouvelle Zélande et au Canada.
Résumés :
« Représentation et participation politique : les Māori font leur entrée sur la scène politique municipale »
Natacha Gagné (Professeure, Université Laval)
Un aspect important des luttes māori à partir de la fin des années 1960 fut la campagne pour faire reconnaître le Traité de Waitangi de 1840 – le seul traité signé par des chefs māori et des représentants de la Couronne britannique – comme voie principale en vue de la décolonisation et d’une réparation des torts relié au passé colonial. Le Traité de Waitangi fut finalement officiellement reconnu à nouveau en 1975, ce qui mena à la création du Tribunal de Waitangi et à la mise en place d’une politique officielle promouvant le biculturalisme. Le Traité, qui reconnaît deux peuples et établit leur partenariat, est maintenant largement interprété comme étant au fondement de l’État néo-zélandais. Les Māori sont devenus depuis des partenaires compétents et couronnés de succès dans plusieurs domaines. Ceci se constate notamment sur la scène politique : la participation et la représentation politique des Māori sont devenues le point central des revendications et des manifestations māori, y compris au niveau municipal. Cette intervention sera l’occasion de se pencher spécifiquement sur la situation à ce niveau et les nouvelles dynamiques urbaines ainsi engendrées. Il sera plus particulièrement question de la représentation des Māori au nouveau Super Conseil municipal de la ville d’Auckland, métropole multiculturelle néo-zélandaise où réside près du quart de toute la population māori du pays. De façon à mettre en perspective les particularités du cas néo-zélandais, quelques comparaisons avec la participation et la représentation politique des peuples autochtones au Canada, État multiculturel, seront établies.
“Indigenous friendly education in Sápmi – Sámi knowledge as a starting point”
Professor Vuokko Hirvonen (Sámi allaskuvla/Sámi University College)
Over many generations the goal of education was to eliminate Sámi learners’ mother tongue and culture. The school programs in Nordic countries, for Sámi and non-Sámi alike, have been based on a systematization of knowledge of national cultures, knowledge of Sámi culture apparently being largely neglected. However, the Sámi people in the Nordic countries have worked intensively since the 1960’s to make their mother tongue (Sámi) the medium of education for their children throughout the compulsory education system. Gradually the Sámi people have succeeded in guaranteeing the linguistic rights of Sámi children.
Today, developing Sámi education from the policy of neglect to more positive educational legislation concerning the Sámi language has improved the position of the Sámi languages and culture and the Sámi school system. This work has been fruitful and in the Nordic countries Sámi children do nowadays have the right to receive instruction in the Sámi language, although the praxis depends on each school. For the Sámi as a minority and as an indigenous people the use of Sámi pedagogy in modern life can encourage and strengthen their identity and cultural values, and our model of learning can be recognized as part of our own epistemology and cosmology for life.
« Règlement des différends dans les hautes terres du Chiapas : Du pluralisme à la porosité juridique »
Akuavi Adonon Viveros (Professeur chercheur à l’Université Autonome Métropolitaine, campus Cuajimalpa)
Cette présentation porte sur une étude du pluralisme juridique dans une société « multiculturelle » telle que le Mexique, le terrain des hauts plateaux du Chiapas, et une ethnie, les Tzotzil. Elle mettra en avant des éléments d’analyse des processus, de la rencontre d’éléments a priori hétéroclites et des pratiques des acteurs. L’attention se centre plutôt sur les règlements des différents familiaux dans les villages de San Juan Chamula et de Zinacantán.
Le contexte général étant la création par l’état fédéré du Chiapas, en 1998, de Tribunaux de Paix et de Conciliation autochtone, suite à la mobilisation zapatiste, cette présentation cherchera à mettre en évidence le fait que le phénomène juridique chez les indiens des hautes terres du Chiapas évolue dans une complexité qui se nourrit des différentes visions sur la justice, tout en évoluant dans un contexte de subordination face à une vision hégémonique du droit et de la justice, vision qu’il faut parfois contourner, parfois combattre ou parfois encore s’approprier…
Pour plus d’informations, voir :http://www.sogip.ehess.fr/spip.php?article583