fév 6, 2015

Séminaire : « Perspectives comparatives sur les droits des peuples autochtones »

Intervenants :

Tassadit Yacine (Directrice d’études LAS/EHESS) : Berbères d’Algérie
Didier Le Saout (maître de conférence, Université paris 8): Le mouvement amazigh entre discours pour la promotion d’une identité et institutionnalisation
Akiyo Afouda (Chargé des droits de l’homme, Union interparlementaire) : La contribution de l’Union interparlementaire à l’implication des parlementaires dans la promotion des droits des peuples autochtones
Présentation :

Au moment où les sens du local et du national sont mis en question par la mondialisation, les mobilisations autochtones produisent de nouvelles pratiques et de nouveaux dispositifs symboliques et politiques sur lesquelles reposent leurs projets collectifs. En mobilisant la rhétorique des droits, à la fois dans des lieux où on fabrique le sens du global et dans les lieux où on fabrique le sens du local, les peuples autochtones essaient de se servir des outils de la gouvernance mondiale pour articuler leurs aspirations aux imaginaires et aux spatialités socio-politiques. Ce scénario soulève d’importants challenges tant pour l’exercice de la citoyenneté autochtone que pour les sciences sociales : quels sont les liens d’appartenance au local, au national et à l’international qui (ou que) construisent les peuples autochtones dans la gouvernance mondiale ? Quels dispositifs pourraient répondre à leurs attentes et à celles des instances de gouvernement quant à la représentation politique de ces peuples ? Quel rôle joue la localité dans la gouvernance mondiale et quels dangers cela comporte pour la participation politique des peuples autochtones ? Quels sont les rapports de force entre les différents domaines internationaux, nationaux, locaux, en ce qui concerne les droits politiques des peuples autochtones ? Quel intérêt pourrait avoir des termes tels que « transnational », « global » ou « glocal » pour comprendre ces nouveaux phénomènes ? Nous réfléchirons à ces questions à la lumière de deux cas : le premier d’eux concerne les peuples berbères d’Algérie et du Maroc dont l’identité constitue, à la fois, un atout de résistance et de mobilisation politique transnationale. Le deuxième cas portera sur le rôle de l’Union interparlementaire dans le renforcement de la représentation des peuples autochtones dans les parlements.

Résumés :

Tassadit Yacine (Directrice d’études LAS/EHESS) : Berbères d’Algérie

L’Algérie est le pays qui compte le plus de Berbérophones après le Maroc. Ils comptent entre plus d’un quart et moins d’un tiers de la population (d’environ 37 millions d’habitants). Ces populations dont la survie a été marquée par la résistance ont, hormis la langue berbère, conservé leur législation, leur gestion de la cité qu’on a aisément comparée à celle de la Grèce antique. Leur identité s’est en quelque fondée sur la lutte et sur la résistance. Les Kabyles ont joué un rôle important dans le mouvement national et pendant la guerre d’Algérie. Leur investissement dans la future nation a été très important. Néanmoins, la construction de l’État-nation s’est effectuée contre eux puisqu’ils seront, de surcroît, désignés comme des ennemis de la nation voire des traitres. Marginalisés, privés de leur culture, suspects, ils se soulevèrent en 1980 lorsqu’un de leur poète, Mouloud Mammeri, a été interdit de parole, ce qui a été à l’origine des événements du printemps 80. Ce mouvement lutte, depuis, en faveur de la reconnaissance de la langue berbère et des libertés démocratiques. Un Mouvement culturel est né (MCB), des partis politiques sont reconnus depuis 1988. Mais, cela n’est rien d’autre qu’une petite brèche ouverte…

Didier Le Saout (maître de conférence, Université Paris 8) : Le mouvement amazigh entre discours pour la promotion d’une identité et institutionnalisation

L’apparition d’un mouvement amazigh est concomitante au Maroc, en Algérie et en France sous des formes différentes. S’il n’est pas possible de dater exactement l’origine de l’affirmation identitaire amazighe, on peut cependant affirmer que la naissance d’un mouvement « berbère » ou « amazigh » remonte aux années 1960 en Algérie, au Maroc et dans l’émigration, notamment en France. Si les premiers temps du mouvement amazigh sont faits d’actions conduites par des groupes isolés rassemblant quelques individus, la contestation s’élargit par la suite en Algérie comme au Maroc jusqu’à produire un discours critique de l’édification de l’État-nation issu de la décolonisation dans ces deux pays. Mais ce sont les manifestations caractérisées de « printemps berbère » qui éclatent en Kabylie qui donneront à la revendication identitaire toute sa visibilité. La mobilisation sera accompagnée d’une institutionnalisation de la culture et de la langue berbère qui intéresse, aussi, le mouvement social. A partir de la fin 2010, dans le contexte des mouvements populaires qui se développent en Afrique du nord et au Moyen-Orient, la demande de reconnaissance de l’amazighité va être placée dans le débat constitutionnel. Ces événements provoquent différents types de réponse de la part des associations et des regroupements militants. En France, les associations pour la défense de la berbérité placent le rapport aux institutions politiques au centre des positionnements mais dans un contexte différent. Elles fondent leur existence sur la construction d’une communauté berbère « de France » dont l’image est projetée dans le champ politique. L’objectif vise l’intégration des militants pour la défense de la berbérité dans la politique française.

Akiyo Afouda (Chargé des droits de l’homme, Union interparlementaire) : La contribution de l’Union interparlementaire à l’implication des parlementaires dans la promotion des droits des peuples autochtones

En tant que partie intégrante de la société, les peuples autochtones doivent jouir des mêmes droits que tous les autres citoyens. En vertu de ce principe fondamental, et suite à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, l’Union interparlementaire (UIP) s’est jointe aux efforts visant à faire prévaloir ce principe et à le matérialiser. M. Akiyo Afouda, qui est en charge du dossier de l’Union interparlementaire consacré aux peuples autochtones, partagera son expérience et les réflexions qui entourent les activités de l’UIP dans ce domaine. Elles se déclinent en : actions de sensibilisation et d’information à l’intention des parlementaires et d’autres acteurs concernés, jusques et y compris la mise en œuvre d’un projet sur la question ; l’organisation de rencontres parlementaires internationales ; la participation aux fora internationaux sur les peuples autochtones ; et la réalisation d’enquête sur la représentation des peuples autochtones dans les parlements.
Prochaine séance :

Jeudi 12 mars 2015
: « Les défis de la participation politique. » Intervenants : David RECONDO (Maître de conférences, Sciences-Po Poitiers), Jean-Pierre CHAUMEIL (Directeur de recherche émérite, CNRS) et Alpa SHAH (Professeure, London School of Economics)

Pour d’autres détails, voir : http://www.sogip.ehess.fr/spip.php?article583

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