Parution : Le roi des rois et la photographie Politique de l’image et pouvoir royal en Éthiopie sous le règne de Ménélik II par Estelle Sohier
La cour de Ménélik II (r. 1889-1913) est un véritable « laboratoire iconographique ». Le roi des rois est le premier à recourir de façon méthodique à la photographie, importée sur les hauts plateaux de l’Éthiopie par des missionnaires, des commerçants et autres voyageurs. Nombre de portraits parvenus jusqu’à nous en témoignent : les dignitaires éthiopiens y posent en arborant les insignes royaux ou des armes, autant d’attributs laissant à penser que ces images ont été élaborées avec soin. L’auteur s’interroge sur les enjeux auxquels répondait la fabrication de ces images, mais aussi sur leurs significations et leurs usages. Quel éclairage apportent ces documents à l’histoire de l’Éthiopie contemporaine et de ses relations avec le monde extérieur ? Les modalités d’appropriation de ce nouveau médium sont retracées à l’aide de sources écrites éthiopiennes et européennes. Les clichés sont aussi replacés au cœur d’un ensemble iconographique plus large, comprenant des peintures d’église, des timbres-poste ou des pièces de monnaie. Dérivés de la photographie, ils témoignent de recherches sur la forme, les supports et les usages des images, au gré des innovations techniques et des besoins politiques. Ces documents comptent parmi les réponses apportées par la royauté face aux bouleversements engendrés par le triomphe de la colonisation européenne sur le continent africain. À l’heure où l’Europe exporte ses médias et ses imaginaires dans le reste du monde, ils reflètent à la fois la souveraineté politique du pays et une idéologie royale relayée tant par le texte que par l’image : souverain modernisateur, féru de techniques nouvelles, Ménélik II revendiquait aussi une ascendance salomonide trois fois millénaire.