jan 23, 2013

La lettre de l’Iddri – janvier 2013

Le T20, un laboratoire d’idées neuves pour le G20 ?

Le Groupe des vingt économies les plus riches du monde, le G20, fournit un cadre de discussion informel aux chefs d’État pour traiter des grands problèmes de l’économie mondiale. Longtemps critiqué pour son conservatisme et l’exclusion du monde en développement, le groupe des six, créé en 1975, s’est élargi à plusieurs reprises avant d’institutionnaliser le G20 en 2008. Ce passage du G8 au G20 témoigne du déplacement du centre de gravité de l’économie mondiale vers les pays émergents et l’Asie notamment. La représentativité du processus s’en trouve également élargie : les pays membres du G20 représentent aujourd’hui plus des deux tiers de la population mondiale, contre moins d’un sixième pour le G8 avant 2008. Pour autant, l’heure des premiers bilans sonne aujourd’hui, après 5 ans d’activité. Le G20 doit, comme le G8, répondre de sa capacité à transformer les économies et surmonter les défis globaux qu’il place au cœur de ses missions, année après année.

Anticipant cet impératif de résultat qui pourrait lui être rappelé, le G20 s’équipe aujourd’hui de nouvelles capacités intellectuelles. Pour la deuxième fois dans le cadre de ses négociations, des think tanks des pays membres sont rassemblés à l’initiative du pays organisateur au sein d’un forum de discussion chargé de proposer des idées neuves. Appelé Think 20 (T20), ce forum fait partie d’un nouveau réseau d’acteurs qui inclut le Civil 20 (ONG), le Business 20 (patronat), le Labour 20 (syndicats) et le Youth 20 (jeunesse). Selon les membres de la troïka (organisateurs mexicains, russes et australiens des précédent, actuel et prochain sommets), l’objet du G20 n’est plus seulement de produire des accords politiques au gré des rapports de force, mais également des idées.

À la demande du ministère des Affaires étrangères, l’Iddri a participé au T20 de Moscou en décembre 2012, aux côtés de l’Institut français des relations internationales (IFRI), du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) et de Terra Nova. L’agenda, qui reprenait le programme des discussions officielles du G20 dans le cadre de la présidence russe en septembre 2013, comportait trois piliers : les déséquilibres macroéconomiques mondiaux ; les questions commerciales et d’investissement ; et le développement durable.
Les discussions au sein du forum ont permis aux think tanks des vingt pays membres de dresser un constat partagé sur la crise financière, résultat non seulement d’un déficit de régulation du secteur financier mais aussi de déséquilibres structurels sur les marchés des biens et des capitaux. Sur le commerce, la plupart des think tanks se sont prononcés pour la poursuite de la libéralisation commerciale, perçue comme un moteur de la croissance et pour la conclusion d’un accord global sur les investissements à l’étranger. Il a été souligné que les États doivent aussi préparer le long terme et, au-delà de la consolidation budgétaire à court terme, s’attaquer aux déséquilibres macroéconomiques structurels.

Sur ces questions de long terme, l’Iddri a regretté que le lien n’ait pas été établi entre les crises environnementales et la macroéconomie. La discussion sur la crise économique accorde une place encore trop faible à la déstabilisation des modèles de croissance causée par l’épuisement des ressources naturelles. Inversement, la discussion sur le développement durable manque d’analyse macroéconomique, même si aujourd’hui émergent de nouveaux modèles industriels et commerciaux autour des technologies vertes.

L’Iddri a aussi mis en avant la nécessité d’approfondir les discussions sur l’objectif de retour de la croissance, étendard du G20. En effet, les perspectives de croissance dans l’OCDE et la résilience des économies émergentes en particulier soulèvent des questions encore trop peu abordées : dans l’hypothèse d’une baisse structurelle des taux de croissance dans les pays les plus riches, quelles en seraient les implications sur le contrat social et plus largement, sur la société ? L’objectif de maximisation du PIB conserve-t-il sa pertinence ? Autant de questions qui structurent le programme sur la « nouvelle prospérité » lancé par l’Iddri en septembre 2012.

À l’issue du T20 de Moscou, une série de recommandations a été soumise à la présidence russe et aux « sherpas » (conseillers des chefs d’État). Ces recommandations reflètent différents points de vue sur les trois piliers mis à l’agenda, mais ne constituent pas une position commune des think tanks ni ne font apparaître les points de divergence entre instituts ou régions représentés. Les divergences pour autant sont au moins aussi intéressantes que les points de convergence, car elles offrent des pistes de réflexion et d’arbitrage dans lesquels les politiques peuvent s’immiscer. Les bonnes idées ne sont pas toujours d’emblée les plus consensuelles. Le processus de consultation que constitue le T20 reste donc perfectible, si le souhait persiste d’en faire une boîte à idées plus efficace et plus transparente pour les G20 futurs. Une discussion organisée sur plusieurs mois entre les instituts participants et en lien avec les autres réseaux d’acteurs, autour de textes précis (comme le font les sherpas), permettrait aux think tanks d’aboutir à des propositions plus novatrices et plus opérationnelles.
Le G20 a entamé une mue intellectuelle. Pour accompagner cette rénovation, l’Iddri travaillera à la fois sur les sujets mis à l’agenda et sur le processus, en poursuivant ses travaux sur les nouveaux modèles de croissance et en œuvrant à la mise en place d’une plate-forme d’échange entre think tanks en vue des prochains sommets, à Saint Petersburg en septembre 2013 et en Australie en 2014.


ÉVÉNEMENTS

Mercredi 23 janvier, à Berlin (Allemagne) – Expert dialogue on energy efficiency: how to combine incentives and regulation?, un atelier d’experts organisé par l’Iddri et l’Institute for Advanced Sustainability Studies (IASS Potsdam).
Ce dialogue d’experts franco-allemand sur l’efficacité énergétique s’inscrit dans le cadre d’une réflexion sur les enjeux de la transition énergétique. Il a pour vocation de renforcer l’échange d’expériences entre les stratégies et modèles français et allemands, ainsi qu’au niveau européen.
Vendredi 25 janvierCitizen participation in environmental governance, une session du séminaire développement durable et économie de l’environnement (SDDEE), animée par Lars Kluver.
Qu’apporte la participation de la société civile aux négociations internationales sur le développement durable en matière de processus de décision politique ? Peut-on en décrire les effets empiriques ? Et que peut-on attendre de tels processus ?
Lundi 28-Jeudi 31 janvier, à Tokyo (Japon) – Earth System Governance Tokyo Conference, une conférence internationale dont l’Iddri est partenaire, organisée dans le cadre du Earth System Governance Project.
L’Iddri intervient dans plusieurs sessions et tables rondes lors de cette conférence internationale consacrée aux questions de gouvernance de l’environnement. Qui « gouverne » l’environnement mondial ? Selon quels « arrangements » et procédures ? Quelles sont les échelles de gouvernance les plus efficaces, dans quels contextes ?
Vendredi 1er février, à Montpellier – Eau, énergies, terres, emplois. Quelles ressources pour nourrir les villes ?, un colloque international dont l’Iddri est partenaire, organisé par la Chaire Alimentations du monde de l’Unesco.
Comment nourrir des populations urbaines toujours plus importantes tout en conservant des objectifs de développement durable ? Ce colloque s’intéressera à ce défi majeur, dont les dimensions — agricole, sociale et économique notamment — sont multiples, interconnectées et complexes.
Samedi 2 février, à New Delhi (Inde)- In-equalities and sustainable development, un événement organisé dans le cadre du Delhi Sustainable Development Summit.
Laurence Tubiana (Iddri), Remi Genevey (AFD) et Rajendra K. Pachauri (TERI) présentent la version anglaise de l’édition 2013 de Regards sur la Terre, l’annuel du développement durable, consacrée à la question des inégalités.
Mardi 5 févrierPlanifier la ville bas carbone, une session du séminaire développement durable et économie de l’environnement (SDDEE), animée par Mathieu Saujot et Eric Vidalenc.
Le potentiel énorme en économies d’énergie et d’émissions de CO2 que recèle l’immobilier, de logement ou professionnel, ne peut se réaliser que dans le cadre cohérent d’un urbanisme conçu dans cet esprit. Ambition difficile, mais pas insurmontable : c’est l’idée que développeront Mathieu Saujot et Eric Vidalenc dans cette session, en utilisant notamment le modèle transport-usage des sols Tranus, appliqué à la région urbaine de Grenoble, et ce pour différents scénarios prospectifs.

VIDÉOTHÈQUE

Mardi 18 décembreTaking action against ocean acidification, une session du séminaire développement durable et économie de l’environnement (SDDEE), animée par Raphaël Billé, Jean-Pierre Gattuso et Ryan Kelly.
L’acidification des océans constitue aujourd’hui l’une des menaces les plus sérieuses pesant sur les écosystèmes et organismes marins. Toutefois, la recherche a jusqu’ici privilégié les implications écologiques et biogéochimiques de ce phénomène, au détriment d’une analyse des enjeux en termes de gestion et de politiques.

PUBLICATIONS

Sovereign Wealth Funds: opportunity or threat for the green economy?
E. Guérin. Working Paper.
Un article consacré aux fonds souverains. Quel est leur fonctionnement ? Quels sont leurs intérêts stratégiques ? Comment ciblent-ils leurs investissements, sur quels secteurs d’activités ? Et dans quelle mesure peuvent-ils contribuer à la transition vers une économie verte ?

Rio+20 Voluntary Commitments: delivering promises on sustainable development?
C. Ramstein. Working Paper.
Consacré au principe des engagements volontaires adopté lors de la Rio+20, cet article questionne la capacité de ces engagements, pris par différents types d’acteurs, à favoriser la définition et la mise en œuvre de politiques de développement durable, et à initier un nouveau modèle de gouvernance internationale.

Changement climatique : tous vulnérables ?
A. Magnan.
Alexandre Magnan publie aux Éditions Rue d’Ulm un ouvrage consacré à la vulnérabilité et aux possibles stratégies d’adaptation au changement climatique : Changement climatique : tous vulnérables ? Il a par ailleurs contribué en tant qu’auteur au rapport Les outre-mer face au défi du changement climatique de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.

LA VIE DE L’IDDRI

Jean Jouzel, président de l’Iddri et vice-président du Giec, a reçu le prix Vetlesen, le « prix Nobel » des sciences de la Terre, décerné par le Lamont-Doherty Earth Observatory de l’université Columbia de New York. Le prix récompense les travaux de Jean Jouzel sur la reconstitution des grands changements climatiques à partir de l’analyse des glaces de l’Antarctique et du Groenland ; il récompense également les travaux de Susan Solomon sur les causes du trou dans la couche d’ozone en Antarctique.

L’Iddri a le plaisir d’accueillir Matthieu Brun au sein du programme Agriculture et alimentation, pour travaillera sur les questions de sécurité et de politiques alimentaires dans le cadre, entre autres, du projet européen Foodsecure.

L’Iddri accueille également Pierre Laboué au sein du programme Agriculture et alimentation pour une période de 4 mois pour travailler sur les questions de gestion de la ressource en eau.

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