mai 13, 2013

La lettre de l’Iddri n°40 – avril 2013

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Directeur de publication
Laurence Tubiana

Rédaction
Pierre Barthélemy

AVRIL 2013 N° 40

PAC 2020 : face au statu quo, reprendre le champ prospectif  !Les débats sur la réforme de la politique agricole commune (PAC) pour la période 2014-2020 durent déjà depuis plus de trois ans. La phase finale des négociations vient de débuter et verra les trois parties prenantes (Commission, Parlement et Conseil européens) se réunir à près de 40 reprises pour aboutir à un compromis, espéré en juin 2013 par la Présidence irlandaise de l’Union. L’enjeu est de taille pour la construction européenne dans une Union élargie à 28, dont c’est l’ une des politiques les plus emblématiques. Mais aussi pour le futur de l’agriculture européenne, dont les transformations ne seront pas sans conséquences sur le reste du monde, alors que les crises financière et budgétaire obligent à repenser l’utilisation des fonds communautaires.

Cette réforme de la PAC s’inscrit dans un contexte singulier pour l’Union européenne. Pour la première fois depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en 2009, la PAC (tout comme la politique commune de la pêche) ne peut être réformée qu’avec l’accord du Parlement, qui voit son rôle renforcé dans la construction des politiques européennes. Conçue pour rendre plus démocratiques et transparentes les procédures législatives, l’introduction de la codécision dans le domaine agricole n’a pas permis une meilleure prise en compte des impératifs de durabilité sociale, économique et environnementale. Et ce alors que des alliances inédites entre mouvements professionnels agricoles, environnementalistes et organisations de solidarité pour le développement ont porté des propositions alternatives innovantes et que la pression commerciale en provenance de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) était bien moindre que dans les précédentes réformes. On pouvait donc s’attendre à une plus grande liberté de choix de la part des décideurs européens. Mais l’élaboration du cadre financier pluriannuel et la question du taux de retour de chaque État membre ont largement dominé la phase finale des négociations.

La Commission agriculture du Parlement (COMAGRI), s’appuyant essentiellement sur l’argument de simplification d’une politique d’application trop complexe, et les ministres de l’Agriculture, critiquant la faisabilité et la pertinence d’une conditionnalité des aides à des pratiques agricoles plus durables, ont affaibli les premières propositions du Commissaire à l’agriculture et au développement rural, Dacian Ciolos. Celles-ci visaient une politique d’appui à un véritable changement de système agricole se fondant sur le verdissement, notamment par la diversification des cultures, l’intégration d’infrastructures écologiques et la rémunération de la production de biens publics. Les négociations s’acheminent donc vers un statu quo qui continuera à opposer les préoccupations environnementales à la compétitivité de l’agriculture, pensée essentiellement en termes de rendements, aux dépens d’un véritable projet de transition pour le secteur.

Si la réforme de la PAC n’impulse pas de changements en profondeur de l’agriculture européenne, d’autres facteurs de transformation — tels que la compétition internationale, les enjeux sanitaires, etc. — vont contribuer à modifier les systèmes agricoles européens. Et d’autres leviers d’action — comme les engagements environnementaux internationaux sur le climat ou la biodiversité — ou d’autres politiques sectorielles méritent d’être analysés pour leur capacité à amorcer la transition du système alimentaire européen vers plus de durabilité.

Compétence partagée entre l’Union et les États membres depuis 2009, la PAC laisse une marge de manœuvre non négligeable aux États. La phase de mise en œuvre nationale devra donc également être suivie avec attention. La France pourra-t-elle saisir cette opportunité pour opérer un changement systémique dans les modes de production agricole ? Le projet agroécologique du ministère français de l’Agriculture (« Produire autrement ») vise à démontrer qu’un tel changement de système permet de concilier performance économique et environnementale et pourrait être un laboratoire d’innovations pour une politique agricole commune refondée, si on ne lui oppose pas l’argument de l’alignement sur le moins disant environnemental dans les autres États membres.

Cette nouvelle PAC, dont la justification ressort largement brouillée des négociations entre gouvernements et organisations professionnelles, risque de perdre fortement en légitimité aux yeux des citoyens. Dès cette année 2013, l’Iddri s’attache à développer des travaux prospectifs pour mettre en discussion les trajectoires futures des agricultures européennes, condition sine qua non pour retrouver une capacité à identifier les leviers d’action pour une transition vers d’autres modèles, et préparer ainsi une autre politique agricole.
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