La newsletter du CERI – Décembre 2013
Cinq ans de direction s’achèvent | ||
Par Christian Lequesne, directeur du CERI Diriger le CERI de 2009 à 2013 est une responsabilité que j’ai eu grand plaisir à assumer. D’abord, parce que le CERI est porté par deux grands organismes de recherche – Sciences Po et le CNRS – qui permettent encore de faire de la recherche en sciences sociales. Bien entendu, il est juste de constater que les budgets diminuent, mais il faut aussi rester raisonnable. Le CERI continue de disposer d’un soutien conséquent de la part de ses « tutelles » (un mot issu du langage administratif qu’il faudrait un jour remplacer, tant il sied mal à la liberté de l’université). En outre, les objets de recherche que porte le CERI lui ont toujours permis de diversifier ses ressources financières par le biais des partenariats et du mécénat. Mon autre motif de satisfaction, et sans aucun doute le principal, est que le CERI est composé de chercheurs, de doctorants et d’une équipe administrative d’accompagnement de la recherche qui ont du talent. Ces compétences expliquent le dynamisme des activités. Pour les chercheurs et les doctorants, cela se traduit par une diversité de paradigmes, de méthodes et d’objets. Un responsable de la recherche m’affirmait un jour que, selon lui, un laboratoire de recherche en sciences sociales devrait absolument être resserré autour d’UN paradigme. Vision effrayante qui fait courir le risque intellectuel aux chercheurs et aux doctorants de reproduire pendant plusieurs lustres le même prêt-à-penser. Rien de tout cela au CERI : le directeur est entouré de chercheurs qui travaillent sur les aires culturelles, sur la sociologie comparée du politique, ou encore sur les relations internationales avec une diversité qui enrichit l’ensemble et qu’il ne faut surtout pas chercher à resserrer par le haut. Le point commun des travaux du CERI est toutefois un appui empirique solide sur des terrains, ce qui est parfaitement compatible avec la théorisation et la conceptualisation. Un directeur du CERI doit aussi se réjouir de l’absence de réflexe ésotérique du type « nous sommes des chercheurs qui n’entendons parler qu’à nos pairs et à n’écrire que pour eux !« . Hélas, une certaine technicisation du métier de chercheur en sciences sociales s’accompagne parfois de ce type de croyance de caste, oubliant que c’est dans la confrontation avec ceux qui ont des expériences totalement différentes que l’on prend la véritable mesure de ce que l’on fait soi-même. L’expérience du CERI montre que l’ouverture à d’autres mondes et à d’autres formes de connaissances est une condition pour garantir de la recherche fondamentale de qualité. Elle est aussi un moyen de trouver des ressources budgétaires sans renoncer à son indépendance. Il y a encore un peu de chemin à parcourir en France pour que les universitaires cooptés dans les instances d’évaluation prennent cette dernière dimension sérieusement en compte. Ils préfèrent habituellement discourir sur la parfaite cohérence des axes de recherche et s’évertuer à trouver LA problématique unitaire du centre, comme si les sciences sociales devaient correspondre à de beaux Léviathans. Enfin, le CERI est un centre de recherche qui est connecté au reste du monde. C’est une grande chance d’avoir eu à diriger des collègues qui circulent, qui sont régulièrement invités dans des colloques à l’étranger, qui publient directement dans d’autres langues que le français, et qui mènent leurs travaux sur des terrains (parfois lointains et risqués). Cette mobilité nécessite parfois d’être expliquée à ceux qui ont du mal à comprendre que le travail puisse être accompli ailleurs que dans des bureaux à heures régulières, ou encore qu’être chercheur ne signifie pas uniquement travailler derrière son ordinateur. Je suis certain qu’Alain Dieckhoff saura faire en sorte que le CERI continue à être une communauté de chercheurs originaux et respectés, à former de jeunes docteurs qui viendront un jour prendre les rênes, à maintenir une forte tradition d’étude des aires culturelles qui retrouvent une place de choix dans les sciences sociales internationales et qui sont une chance pour Sciences Po. Je suis heureux de rester au CERI pour y poursuivre mes travaux de recherche parmi mes collègues chercheurs, doctorants et administrateurs de la recherche. Je les remercie tous et toutes de leur travail et de leur engagement pendant ces cinq années à mes côtés. Ma reconnaissance s’adresse aussi aux Directeurs du CNRS et aux Administrateurs de Sciences Po, Richard Descoings et Frédéric Mion, pour leur soutien. A l’heure des bilans, je souhaite avoir une pensée particulière pour Richard Descoings, avec lequel j’ai eu la chance de travailler de 2009 à 2012. S’il est arrivé que je lui exprime mon désaccord sur ses choix, notamment dans des mails au ton « franc et direct » (comme disent les diplomates) qu’il aimait me rappeler après coup en riant, je garde de Richard le souvenir d’un homme d’exception. Merci aussi à tous les partenaires du CERI – administrations, entreprises, associations, médias – pour leur confiance. Bonnes fêtes et excellente année 2014. |